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Après près d’un mois d’arrêt à Ulaan Baatar, nous repartons le 26 septembre heureux de remonter sur nos selles. Faux départ ce jour-là … Nous nous arrêtons au bureau de l’immigration pour récupérer nos passeports avec un mois d’extension de visa. Attiré par nos montures, un couple radieux vient à notre rencontre, nous saluant d’emblée en français : Eric & Christine pédalent le monde depuis 3 ans et sont bien sûr interpellés de nous voir. Quand deux couples de cyclistes se rencontrent, les questions fusent dans tous les sens. Résultat des courses, nous ne partirons que le lendemain …

Pour traverser le désert du Gobi, la consigne est claire : tenir un cap sud-est en restant entre la ligne électrique principale et la voie de chemin de fer. Sur cette base, choisir LA trace de véhicule qui nous semble la principale … Bienque la carte nous indique une route tracée, nous savons que sur les 650 km qui nous séparent de la frontière avec la Chine, 450 sont faits de sable, de terre, de pierres et de gravier. Le désert est habité par les nomades et nous pouvons compter en moyenne 110 km entre les bourgades où nous pourrons nous ravitailler. Malgré tout, en grands gourmets que nous sommes, nous choisissons de partir avec les ingrédients de notre menu favori : des pâtes, du sésame, des tomates et des concombres frais, de quoi pique-niquer et une réserve de lait pour prendre des délicieux déjeuners cacaotés. Dès les premiers mètres, nous sentons bien qu’une fois de plus notre poids sera un handicap … Mais nous avons aussi appris à nous habituer à tout !!! Plus que prévoyants et n’ayant plus la possibilité de faire du feu, nous prenons avec nous 7 litres de fuel pour faire fonctionner notre réchaud.

Plus que toute autre étape dans notre voyage, celle nous Gobi nous amène à nous poser beaucoup de questions. Grâce aux rencontres et à Internet, nous y trouvons des réponses plus que rassurantes. Avec Eric & Christine qui terminent fraîchement la traversée, nous obtenons certainement les informations les plus objectives : rien à craindre quant aux possibilités de ravitaillement en eau et en nourriture, mais malgré tout cette étape est dure, en raison des conditions de la piste, de la sécheresse et du vent. Nous sommes fin prêts à dévoiler le mystère que l’étape du désert de Gobi fait planer dans nos esprits depuis quelque temps …

Dès les premiers mètres de piste, nous saisissons que notre moyenne journalière sera largement revue à la baisse, contraints non seulement par la mauvaise qualité de la piste mais aussi par les journées qui s’écourtent de plus en plus. C’est un plaisir intense de nous arrêter à temps, vers 16 heures 30 pour monter notre campement, préparer notre repas et profiter des sublimes couchers de soleil. Encore plus que la Sibérie, la Mongolie nous ouvre son terrain de camping géant. Et une fois de plus notre sentiment de liberté est exacerbé …

 

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La journée, le soleil donne mais le vent souffle constamment et rafraîchit l’air ce qui rend le temps agréable pour traverser cette région. Nous savons que l’hiver est à nos trousses : il a déjà neigé à Ulaan Baatar … Afin de ne pas nous faire surprendre par la rudesse du climat, nous nous imposons un rythme et parvenons pour la première fois depuis le début du voyage à démarrer chaque matin à 9 heures au plus tard.

Nous avons passé 19 jours intenses dans le désert, 19 jours de découverte et de révélation. Pour nous, le Gobi est la région de la Mongolie la plus dépaysante. A tout moment nous étions sous le charme de la beauté du désert, des paysages immenses, minéraux, colorés, et fascinants. C’est aussi l’étape du voyage où nous avons rencontré le moins de monde. Il reste des yourtes mais on voit que beaucoup de nomades ont déjà bougé vers un campement moins rude pour y passer l’hiver. On trouve encore sur les bords de piste de nombreux troupeaux de chevaux ou de chameaux. Un midi pendant que nous pique-niquons, un nomade à moto s’arrête à nos côtés. Il sort sa paire de jumelles et nous explique qu’il cherche son troupeau de vaches. Nous ne voyons rien à l’horizon mais lui file dans une direction …

Aux deux tiers du parcours, nous décidons de faire un détour d’une trentaine de kilomètres pour voir des dunes. Le désert de Gobi n’est constitué qu’à 3 pourcents de sable ; il n’y a pas beaucoup de dunes, en être si proches (30 km dans le Gobi ce n’est tout de même pas rien !!!) est une aubaine à ne pas manquer. Elles ne sont pas indiquées sur notre carte, nous n’avons pas non plus de point GPS, juste quelques vagues explications sur le chemin à prendre. Nous trouvons les dunes aisément et posons notre campement à leur pied ce qui nous permet d’aller nous promener dessus sans perdre la tente de vue. Loin des paysages sahariens, celui qui s’ouvre à nous nous enchante et nous restons une fois de plus subjugués du changement de paysage que nous pouvons observer chaque jour ; qui a dit que le désert est monotone ?

Le soir, un cavalier déboule dans le noir et à cru. Pour lui il fait trop froid et il nous propose de passer la nuit chez lui. Nous lui expliquons avec les mains que nous sommes bien équipés, qu’il est un peu tard pour démonter tout le matériel. Mais nous lui promettons de venir le voir demain matin chez lui. Le lendemain, comme promis nous allons à la rencontre du cavalier et de sa famille. Ils nous accueillent avec un thé salé au lait de chamelle, fade mais très efficace pour nous réchauffer. Le poêle au milieu de la yourte est en activité ; nous apprécions beaucoup de retrouver la chaleur du logis et de la famille qui nous accueille, et acceptons avec joie leur invitation à passer la journée et la nuit chez eux. 24 heures dans le quotidien d’une famille nomade dans le Gobi … Une vie rythmée, calmement en ce début d’hiver, par les travaux quotidiens liés aux bêtes et au foyer.

 

 

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C’est la plus jeune sœur de 17 ans qui tient la maison, sa mère lui ayant déjà mis beaucoup de responsabilités entre les mains. Durant la journée, nous observons la mère préparer dans le poêle des pattes de chèvre : elle les brûle, puis retire le brûlé et ce plusieurs fois ; pendant ce temps, elle fait bouillir une tête de mouton. Ces préparations nous intriguent beaucoup … Soudainement, le père de famille apparaît, s’assied à même le sol et reçoit l’assiette contenant en vrac tous les abats qu’il déguste seul. Un rustre que nous ne verrons plus ; il habite seul dans une autre yourte à quelques mètres de là. Le repas de base quotidien est une soupe de nouilles faites « maison » avec des oignons et des bouts de gras. Elle peut être agrémentée de rondelles de carottes et de pommes de terre en fonction des disponibilités de ces ingrédients sur le marché local à plusieurs dizaines de km de là. Au petit matin, juste avant notre départ et pour nous honorer du temps que nous avons passé avec eux, la mère de famille nous sert une patte de chèvre et un morceau de mâchoire de mouton ; sous le regard pesant de 6 paires d’yeux posées sur nous, nous nous sentons peu habiles à décortiquer ces mets de choix … La soupe de farine bouillie qui suivra nous remplira plus les estomacs !!!

Au terme des 450 km de piste, nous faisons un bilan plutôt positif. On a poussé nos vélos dans quelques bancs de sable mais jamais plus que quelques mètres. Il nous est arrivé de bien rouler, mais de nombreuses fois, la piste s’est transformée en tôle ondulée, très mauvaise pour nos petits corps et surtout les vélos. Nous ne nous sommes jamais perdus même si parfois nous trouvions la piste principale au petit bonheur la chance. Nous n’avons crevé qu’une seule fois mais on a mis l’après-midi à poser une vingtaine de rustines pour réparer nos pneus. La raison : de terribles petites boules piquantes qui jonchent la piste et s’en prennent aux roues de nos remorques, les plus vulnérables.

Une soir où nous sommes arrêtés dans un village, logés au chaud pour profiter d’une douche bien nécessaire, nous rencontrons une équipe d’ingénieurs chinois engagés sur le projet de construction d’une route bitumée qui remplacera d’ici maximum 2 ans la piste que nous suivons. Nous nous sentons alors privilégiés d’être parmi les derniers voyageurs à emprunter cet axe principal vers la Chine en foulant la terre battue du Gobi.

Nous passons notre dernière journée de piste avant Zamyn Uud, ville frontière avec la Chine, en compagnie de Sorouche et Damien, 2 canadiens parcourant Moscou-Pékin à vélo. Quand les 2 compères nous rattrapent, nous les trouvons bien fatigués : cela fait seulement un peu plus de 2 mois qu’ils ont quitté Moscou !!! Quand ils nous rattrapent, ils n’ont plus d’eau et leur matériel est fortement éprouvé par le rythme infernal qu’ils se sont imposés. Le soir de notre rencontre, nous leur proposons de partager notre repas et de pédaler les quelques km qui les séparent de la frontière à notre rythme. Cerise sur le gâteau, nous leur faisons écouter quelques airs de chez eux …

La sensation qui nous emplit à la fin de la traversée du désert de Gobi est double, d’une part la joie d’avoir parcouru cette piste avec succès et d’avoir profité pleinement de ces fabuleux paysages, d’autre part l’excitation de nous retrouver si proches de la Chine et de tous ses mystères, de cet inconnu majeur fortement noirci par tous les préjugés qui ont pu être émis sur cette contrée. Avant d’entamer cette quatrième étape du voyage (après l’Europe, la Russie et la Mongolie), nous nous offrons 2 belles journée de repos à Zamyn Uud, temps nécessaire pour remettre les vélos en état, nous bichonner un peu et faire quelques provisions car nous savons que sur les 125 prochains km nous n’auront pas de possibilité de ravitaillement.

quelques km avant d’arriver a Oulaan Baatar, nous nous arretons pour prendre une derniere respiration saine: au loin nous apercevons la ville derriere un voile de poussiere, un ecran brunatre de pollution reste en suspension et les usines dispersent leurs volutes grises. entouree de hautes collines sacrees, la ville s’etend tout en longueur sur au moins 20 km et alors que nous croyions etre au centre de la ville, nous ne sommes qu’au tout debut de la carte … nous telephonons a Midkhat qui a fermement accepte de nous recevoir chez lui; son telephone est eteint !!! nouvelle tentative une bonne heure plus tard, toujours rien et pas de plan B. un homme vient a notre rencontre dans la rue et nous invite spontanement chez lui; nous acceptons son invitation, esperant parvenir a joindre notre hote le lendemain. Ourta habite completement a l’oppose de la ville, c’est l’heure de pointe, nos petits poumons aux alveoles bien ouvertes ne sont pas contents … 15 km a nous faufiler entre les gros 4×4, les bus et eviter les pietons qui deboulent a tout moment.

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nous sommes contents de pouvoir penetrer un brin dans l’intimite mongole, en ville cette fois. Ourta admet que sa femme lui manque: elle vit aux USA pour aider sa fille qui y suit ses etudes de medecine. pas facile pour un homme mongole de tenir la maison et d’accomplir les taches menageres …  il se sent soulage quand Cynthia lui propose de  l’aider a cuisiner. notre hote est charmant et, ne parvenant toujours pas a joindre Midkhat, il nous offre le logis une nuit de plus. des le lendemain nous irons a la recherche d’une guesthouse, pour la premiere fois en plus d’un an de voyage …

au programme de notre sejour en capitale: l’achat de 2 yourtes en perspective de notre futur projet d’habitat le jour ou nous nous poserons … premiere etape, trouver un transporteur; de fil en aiguille, nous avons trouve le moyen de partager un container avec des inconnus et d’ainsi en partager le cout.

deuxieme etape, comment acheter 2 yourtes, sans s’y connaitre vraiment et surtout sans parler mongole. premiere prospection au grand marche de la ville. ce que nous voyons ne nous convainc pas vraiment. soit on achete les pieces detachees (et l’air de rien il y en a un paquet) soit on achete des yourtes « cle sur porte » mais comment mesurer la qualite de ce que nous achetons, comment savoir si les prix sont justes, comment faire pour tout rassembler, pour tout emballer et quid du transport chez le transporteur … nous nous sentons un peu decourages, pas si simple d’acheter une yourte !!! 

en parlant de notre projet a droite et a gauche, nous rencontrons finalement Daka qui a l’habitude de vendre des yourtes a l’export pour l’Europe. elle nous informe d’abord des adaptations des materiaux necessaires aux climats humides de nos regions. elle offre egalement tout un service de taille, celui de nous fournir les documents necessaires a l’exportation, d’emballer le tout de maniere solide et propre et d’amener le tout chez le transporteur. nous preferons de loin conclure avec elle, qui de plus est charmante. nous allons ensemble visiter l’atelier du bois et celui du feutre, ce qui nous permet d’avoir un oeil sur la tracabilite de ce que nous achetons. les yourtes seront pretes demain et nous allons a l’atelier nous faire la main au montage …

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la commande lancee, il ne nous reste plus qu’a profiter de la ville pendant encore 2 semaines. un deuxieme demenagement nous mene chez l’etonnant Midkhat, une semaine plus tard que prevu. Russe, il travaille pour une compagnie miniere australienne en Mongolie. aimant plus que tout que son appartement soit envahi par un maximum de voyageurs, il deborde d’une incroyable generosite d’accueil.

manquant d’intimite, un peu spartiate et assez bruyant, nous preferons repondre a l’invitation de Daka de nous loger chez elle. troisieme demenagement et nous atterrissons en plein centre ville, dans un petit appartement spacieux rien que pour nous deux … un havre de calme avec plein de facilites, nous sommes ravis.

une fois habitues a la pollution et a la poussiere, nous trouvons la vie dans cette ville assez sympathique.  nous nous sentons bel et bien en Asie: l’attidude des gens, les parfums dans la rue, le desordre ambiant, … alors que la traversee de la Russie nous a completement isoles de l’industrie touristique, le fait de passer quelques jours en guesthouse, de nous retrouver dans une capitale, au croisement de parcours tres touristiques, nous rencontrons d’autres voyageurs en tout genre et aux recits divers.

Saatia est australienne et voyage en Mongolie a la recherche des artisans de yourtes. elle developpe depuis un an un business qui l’amene a exporter les yourtes chez elle. un petit bout de femme pechu qui ne se laisse pas marcher sur les pieds …

Gilles & Brigitte, de Toulouse, sont enseignants et profitent des facilites qu’offre le ministere de l’education pour voyager durant 5 mois. ils ont ete de fideles compagnons dans notre recherche de yourtes, eux-memes interesses a en acheter une. nous nous reverrons pour sur autour d’un bon foie gras artisanal …

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Paivi & Santeri, finlandais, voyagent depuis 3 ans a la recherche d’une communaute qui leur permettrait de vivre sans devoir investir dans des biens materiels; pour eux l’argent c’est le diable …

Mohammed, pakistanais, nous a ete d’une aide precieuse. il tient un business notamment d’importation de voitures japonaises de seconde main et nous a permis de resouder l’une de nos remorques; tres beau travail, gratuit en plus. il vit ici depuis une dizaine d’annees et est marie a une mongole; un metissage tres interessant … nous serons a nouveau leurs hotes samedi soir pour un repas pakistanais, miam, miam.

nous avons prevu de reprendre la route dimanche prochain, inch allah si nos yourtes sont pretes pour l’envoi. 650 km nous separent de la frontiere avec la Chine, dont 450 km a travers le fameux desert de Gobi. alors nous nous sommes delestes de quelques objets qui n’etaient plus necessaires pour laisser la place a une reserve de 35 litres d’eau … une etape du voyage qui ne manque pas de nous exciter …

a bientot,

Cynthia & DoM 

au depart d’Ulan Ude, notre derniere etape au pays de Poutine et des matriochkas, nous disons au revoir a Zoric qui nous a accueillis chez lui avec beaucoup de simplicite et de sympathie, nous bercant des ses notes de guitare. sur la route, les forets denses ont disparu pour ceder la place a des montagnes moins abruptes, des collines arrondies au vert quelque peu desseche par l’ete sec et ensoleille. l’espace s’est encore elargi, au-dessus de nos tetes l’immensite du ciel se devoile petit a petit. on apercoit deja des troupeaux de chevaux galopant en liberte. la Mongolie n’est plus tres loin …

l’escale de ce soir est une premiere pour nous. nous nous arretons dans un monastere a une bonne 40aine de km d’Ulan Ude, centre du boudhisme siberien et sommes invites a passer la nuit sous une yourte qui sert quotidiennement de cafe pour les visiteurs de passage. l’espace est tres chaleureux, le sol recouvert de tapis nosu permettant d’y poser nos matelas; meme les velos auront droit d’y dormir tant c’est spacieux. la petite cerise sur le gateau, c’est le chien qui se poste devant la porte et chasse les rodeurs …

il est temps pour nous d’entamer la phase definitive de l’adaptation mentale a quitter ce pays que nous avons tant aime. presque plus en Russie, pas encore en Mongolie … les quelques 300 km qui nous separent de la frontiere representent pour nous comme un espace de no man’s land ou nous vivons des sensations parfois etranges. c’est une autre Russie que nous decouvrons ici, les paysages ont change, et les facies sont deja types mongoles. nous privilegions les nuits sous la tente, sentant les villages moins accueillants, souvent eteints, nos quelques rencontres ne nous menant pas jusque chez elles; nous nous retrouvons entre nous pour cette etape du voyage.

mardi 21 aout, nous arrivons a Kyakhta, ville frontiere aux allures de garnison. nous passons a cote de casernes militaires et de nos selles on apercoit des equipements et des infrastructures tels que nous nous demandons si une guerre se prepare entre les 2 voisins. beaucoup d’uniformes dans les rues, des douaniers, des policiers, des militaires. nous voulons passer la frontiere le lendemain matin; l’endroit ne nous inspire pas pour y planter la tente, beaucoup de barbeles, des terrains militaires, les villes frontieres sont souvent des endroits particuliers. nous nous resignons a prendre une chambre a l’hotel du coin.

un controle de routine nous fait rencontrer l’agent responsable de la verification des passeports des etrangers. quelques bribes des conversations tenues avec nos rudiments de Russe …

– combien de temps avez-vous passe en Russie ? plus de 11 mois

– ou sont vos tempons d’enregistrement ? la

– mais en tant de temps vous n’avez qu’un seul tampon ? nous avons ete enregistres pour une periode de 6 mois cet hiver. l’officier qui s’en est charge nous a confirme que l’enregistrement a ete fait de maniere informatique et que nous n’avions desormais plus besoin de tampon.

– pourquoi vous n’avez pas de tampon ? parce que nous sommes enregistres par ordinateur. voici les coordonnees de la personne qui s’est occupee de nous enregistrer, vous pouvez l’appeler.

– donnez-moi alors votre telephone nous n’en avons pas.

– alors je ne peux l’appeler, ca coute trop cher mais vous avez un telephone dans votre bureau, pourquoi ne pas l’utiliser ?

– ce n’est pas mon travail  

elle revient plus tard avec un formulaire en Russe en nous expliquant que nous devons payer une amende de 2000 roubles (environ 60 euros) chacun. nous demandons a pouvoir avoir un interprete, une personne qui parle anglais pour que nous puissions nous exprimer pleinement et surtout nous assurer du contenu de ce maudit papier, ne pas signer n’importe quoi. nous recommencons nos explications. l’agent nous dit ne pas disposer de cette base de donnees … vive le progres !!! mais puisque nous n’avons pas LE tampon attestant de notre enregistrement, c’est tant pis pour nous, meme si nous ne sommes pas responsables de ces incoherences dans le systeme.

mais notre etoile ne nous a pas laches ;c)) l’agent, qui au fond d’elle-meme a bien saisi que nous sommes de bonne foi mais doit faire preuve de son autorite sur nous, nous demande si nous comptons revenir en Russie, ce que nous confirmons bien sur et nous dit alors que nous paierons la prochaine fois, oui oui nous repasserons par cette frontiere …

le lendemain, nous arrivons a 9h30 devant les grilles de la frontiere, toujours incertains quant a la possibilite de passer la frontiere a velo (les pietons n’ont pas le droit de passer la frontiere, ils doivent etre dans un vehicule, va-t-en savoir pourquoi, grand mystere que nous n’avons toujours pas elucide). 3 files, pour les voitures, les camions et les petites camionnettes, pas de file pour les velos (ben ca alors !!!); nous choisissons celle des voitures. et c’est parti pour quelques heures d’attente. le personnel arrive 1 heure apres l’heure d’ouverture officielle de la frontiere et laisse passer les camionnettes au compte-goutte, puis c’est au tour des voitures, une par une. vient notre tour, nous nous trouvons en premiere ligne, devant la grande grille, la porte Sesame vers la Mongolie. nos coeurs battent … passera ou passera pas ??? la grille s’ouvre, l’officier nous fait signe de rentrer, youpie, mais tout n’est pas joue, il nous manque THE tampon, le papier que l’agent nous a redige va-t-il nous preserver de reprimandes supplementaires ?

premiere poste, controle douanier, le mec est cool, il ne nous fera ouvrir qu’un sac de remorque et 2 fontes. on a de la tisane en vrac dans un sachet (artisanale, cueillie dans les pres et sechee au soleil), il nous demande si c’est du cannabis !!! il n’a pas du en voir souvent meme si ca pousse partout sur les bords de route … deuxieme poste, une femme avec le sourire monte a l’envers, oups en fait elle ne doit pas avoir le droit de sourire, drilee a montrer les crocs et a etre la plus desagreable possible. on confirme bien que nous paierons l’amende au retour (on compte bien sur l’inefficacite du systeme !!!). c’est bon, on passe …

reste la frontiere mongole, et la c’est la relache: nous sommes accueillis avec des sourires, les douaniers nous apprennent a dire bonjour en Mongole, nous sommes dans un autre pays. une demi-journee plus tard, we made it !!! il parait qu’il faut compter une journee pour passer la frontiere avec la Chine …

nous ne tardons pas pour nous eloigner de la zone frontaliere, nous n’aimons pas ces zones, souvent sales, peu agreables, reperes de toutes sortes de trafics, et surtout nous avons hate de penetrer dans le pays. un ami de Dom nous a vivement recommande d’aller rendre visite a une de ses amies Mongoles, il est 14h30 et nous avons encore une bonne 40aine de km a parcourir pour arriver chez elle. deja nous apercevons des taches blanches dans le fond du paysage: les fameuses yourtes de Mongolie … autour de nous les dernieres montagnes du sud de la Siberie dont nous nous eloignons sous un ciel gris et terne.

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nous nous sentons emplis de joie d’etre en Mongolie, nous volons sur nos bicyclettes. nous arrivons a Shamar devant la maison d’Altan et sa famille bien a temps mais elle n’est pas encore rentree. nous rencontrons son fils qui nous fait rentrer chez eux, nous ressentons deja les difficultes de la langue et ne comprenons pas un mot a ce qu’il nous dit. oups, nous avions oublie ces sensations de frustrations liees a la langue …

Altan rentre bien plus tard, et nous accueille chez elle avec une incroyable aisance, juste en mentionnant le prenom de son ami francais. elle est fiere de parler une langue qu’elle qualifie d’internationale, un melange de russe, d’anglais, de francais et de mongole, et se fait bien comprendre. nous sommes tout de meme rassures de parler russe qu’elle maitrise mieux et d’ainsi pouvoir aussi communiquer avec son mari. nous lui demandons si l’on peut passer la journee du lendemain chez eux, sentant le besoin de nous poser en Mongolie, de nous sentir dans ce pays. et c’etait un excellent choix car il a plu a torrent toute la journee … une journee ideale pour bavarder avec nos hotes justement en conge et faire connaissance. nous avons passe un agreable moment en leur compagnie, merci Olivier de nous avoir indique le chemin jusque chez eux.

de retour sur nos selles, nous nous rendons compte que nous n’avons pas assez de provisions avec nous, habitues a la Russie ou il est tellement facile de trouver des epiceries bien approvisionnees et de l’eau. en Mongolie, les rares villages sont beaucoup plus eloignes et les sources d’eau moins presentes, nous devons prendre l’habitude de prevoir au moins 2 jours a l’avance. heureusement Altan a quelques ressources et nous pouvons acheter quelques produits locaux.

c’est parti, il fait superbe. nous nous eloignons un peu plus des paysages encore proches de ceux de la Siberie, les montagnes deviennent des collines verdoyantes sur lesquelles paturent librement d’immenses troupeaux de vaches, de moutons ou de chevres. nous voyons les chevaux courir en liberte, rencontrons 2 jeunes qui font transhumer leurs troupeaux vers un nouveau campement; ils transportent les quelques affaires dont ils ont besoin a dos de chameau.

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meme si nous suivons l’axe principal nord-sud vers Oulaan Baator, nous nous regalons deja de ces superbes paysages, de l’immensite des terres, vierges de constructions, du beau ciel bleu. le soir, nous montons notre campement a proximite des yourtes, laissant ainsi les nomades libres de choisir le moment de la rencontre, nous ne voulons pas interrompre le cours de leurs travaux souvent vitaux.

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curieux de voir aparaitre dans leur horizon une yourte a l’allure inhabituelle, ils viennent facilement a notre rencontre, pour discuter, ou pour simplement s’asseoir pres de nous, en silence. ils n’hesitent pas a nous inviter a visiter leur yourte et a nous faire gouter leurs specialites.
notre bilan: l’airag ou le lait de jument fermente on a pas aime du tout, c’est aigre et acide. le fromage seche dur comme de la pierre n’avait pas de gout, la creme etait bonne et le the au lait est sale et n’a de the que le nom, c’est juste de l’eau et du lait.

ces rencontres sont aussi l’occasion d’echange de provisions, pour nous du lait pour eux des concombres ou des tomates du stock que nous nous sommes constitue avec tous les cadeaux recus, des denrees precieuses pour les familles qui ne les cultivent pas.

nous craignions les chiens de Mongolie, dresse a garder les troupeaux et repites pour detester les cyclistes. nous n’avons pas encore du tester notre kit de suture, ouf !!! paradoxalement nous avons trouve ces chiens tres timores. ils s’approchent de nous, curieux egalement, nos tentons de les caresser mais bien souvent ils se sauvent. nous les aimons bien ces chiens, ils sont beaux, bien nourris et en liberte comme tous les animaux dans ce pays.

la route est belle; la Mongolie etant un des plus hauts pays du monde, il nous faut passer quelques cols. sur la route, plutot que de nous klaxonner comme en Russie (ce qui nous fait sursauter sur nos selles), les automobilistes nous saluent. les gens sont tellement souriants, tout naturellement, et cela nous allege. meme si nous avons ete superbement accueillis en Russie, nous devons admettre que ce peuple peut montrer un abord froid, peu souriant, mefiant.

au detour d’une montee, arrivant en sens inverse, nous croisons Jack & Marco, 2 Allemands a velo tout comme nous. sympathique rencontre avec des collegues qui font a contre-sens le meme trajet que nous, jusque Irkoutsk seulement car leur temps est compte. nous restons sur le bord de la route pour partager quelques infos sur l’itineraire, quelques points techniques et quelques anecdotes. 

nous croisons egalement des camions souvent surcharges transportant les yourtes et les familles. nous nous sentons proches de leur mode de vie, nomades parmi les nomades …

ce passage en Mongolie, nous a veritablement fait basculer en Asie. nous nous sentons grises de poursuivre notre route au plus profond de ce continent. a l’origine destination finale, Pekin ne devient plus qu’une etape de ce fabuleux voyage.

chere tribu,

sorry David d’etre restes plus d’un mois sans nouvelles ;c))

au dernier recit, nous etions a Chelyabinsk. de la, 2000 km ou 35 heures de train pour rattraper un peu le temps qui passe trop vite. c’est cool le train !!!. rien d’autre a faire que dormir, lire, manger et bavarder.

de Krasnoyarsk a Oulan Oude, a peu pres 1700 km (le plus direct n’est pas cnouskonpedale !!!) et nous sortons enfin de l’obscurantisme: nous comprenons desormais l’origine des montagnes russes, celebre attraction populaire des parcs d’attraction. et surtout 80% de la route qui nous a menes de Krasnoyarsk a Oulan Oude. ca monte, ca descend, ca tourne, et ca remonte, ca redescend, etc … qui a cru que la Siberie est plate ??? certaines descentes faisaient 9 km de long (le pied !!!), d’autres montees allaient au-dela de 10 km pour le plus grand plaisir de Dom qui aime se faire mal.

et la route … ben pas toujours asphaltee, nous sommes en Russie tout de meme, et il nous est arrive de faire 40 bornes sur une piste defoncee et caillouteuse (seulement un rayon casse, pas de crevaison !!!), max 7 km/heure, alors qu’il s’agit de la route unique a travers le sud de la Siberie, un axe majeur. plus rien ne nous etonne en Russie !!!

les yagadas, c’est le mot generique en russe pour designer les baies en tout genre: fraises, framboises, myrtilles, … et a cette saison de l’annee, la nature et les jardins en sont combles. a tel point que les gens nous les offrent en masse car eux en sont gaves. ils les ramassent dans les bois et les pres, et les vendent par seaux entiers sur le bord de la route. les jardins sont merveilleux, garnis a profusion. une nature genereuse et abondante apres les rudes mois de l’hiver.

il en est de meme de tous les paysages, des forets denses, des prairies vastes, colorees (jaunes, mauves) et herbeuses, le vert intense est la couleur dominante. une nature vierge car aucune voie aisee n’y accede. cette incroyable nature offre au voyageur l’immense liberte d’etablir son campement ou il veut. pas de restrictions, mis a part quelques reserves naturelles, la propriete privee existe a peine. seul hic, c’est toujours le TGV russe ou Train a Grand Vacarme !!! la ligne unique suit la route unique .. avec nos velos charges, on peut difficilement nous en eloigner pour la nuit et le « doux » bruit du train « berce » nos nuits c(( ce n’est pas l’un ou l’autre train, mais une circulation intensive de trains de marchandises et de passagers. alors c’est plus ecolo mais ca perturbe la quietude de ces surperbes endroits.

c’etait un reve, un nom mythique, … nous l’avons vu, nous l’avons touche, nous l’avons goute: le BAIKAL … une masse d’eau cristalline, pure, a tel point qu’on peut boire en nageant. completement gele l’hiver, l’eau y est bonne pour la baignade l’ete (dingue !!!). nous en avons profite, nous l’avons longe durant une semaine, un pincement au coeur quand notre route s’en est devie. et il parait que nous n’avons as vu le plus beau … les rives sont montagneuses, des falaises qui se jettent dans l’eau, des torrents purs qui l’alimentent, splendide.

amoureux de la Russie, encore plus de la Siberie, nous voulions prolonger notre visa dans le pays de quelques mois. nous realisions alors que nous restions d’eternels insatisfaits, que nous en voulions plus et toujours plus, assoiffes de cette belle nature, de rencontres de ce peuple attachant. nous nous sommes alors resolus a accepter qu’a velo nous ne pourrions tout voir, que nous avons choisi la transhumance et par consequent nous sommes amenes a quitter, a aller plus loin, a passer, … mentalement nous nous preparions a aller ailleurs, a aller savourer d’autres gouts, humer d’autres odeurs, contempler d’autres splendeurs, …

plus de 5000 km parcourus en Russie et on realise que malgre l’immensite du territoire, les maisons et les blocs de beton urbains se ressemblent, pas de particularites regionales au niveau de l’architecture. tous les Russes mangent la meme chose a travers tout le pays; ils cultivent les memes legumes, cueillent les memes fruits et en font les memes conserves pour l’hiver. et quel que soit le type ethnique … ici a Oulan Oude, en majorite les visages sont arrondis, les yeux brides, les nez aplatis, mais la vie est la meme qu’a Saint-Petersbourg, Kazan ou Chelyabinsk. cette uniformite nous epate, nous espante. incroyable Russie !!!

tout au long de notre itineraire en Russie, nous avons recu une incroyable quantite de bons voeux de la part des gens: heureux voyage (traductin litterale), bonne chance, bonne route, … et croyez-le ou non mais quand ce fil est long de 5000 km nous nous sentons enrobes de bienveillance. un fil d’energie positive, de bonnes intentions, notre etoile ne travaille pas toute seule, c’est un reseau que nous avons cree.

nous sommes a 230 km de la frontiere avec la Mongolie et bientot 8000 km au compteur. petit a petit nous faisons notre route. petit a petit nous avancons. nous relativisons les distances; nous nous sentons loin et tellement pres a la fois.

ce ne sera qu’une premiere etape en Mongolie, que nous traversons via Oulaan Baator et un bout du Gobi pour rejoindre la Chine et Pekin fin novembre au plus tard. l’objectif est de rejoindre le sud, un climat plus clement pour l’hiver. nous y retournerons l’ete prochain plus longuement, pour profiter de l’ete, septembre pouvant deja etre froid; la Mongolie est un des pays les plus hauts du monde.

nous aussi nous sommes avides de vous lire autant que possible. gourmands de lectures, les pensees ne nous suffisent pas toujours. le temps passe … nous vous esperons tous en forme et heureux.

on vous embrasse bien fort,

les amoureux a roulettes

Plus de 6000 km au compteur … Dans quelques jours, deja une annee de voyage … Tellement de bonheur …

Nous venons a peine d’enfourcher nos montures, de dire au revoir a notre hote, il est passe midi quand, en pleine montee, DoM entend un homme nous courir apres. Premiere reaction, comme ca nous arrive plusieurs fois par jour, on ne peut pas repondre a toutes les personnes qui nous accostent, ou “encore un adepte de la vodka dont on ne va pas comprendre les douces paroles” … Mais l’homme persevere, nous poursuit en courant et nous parle en anglais: Kim, suedois et Phil, anglais, traversent la Russie a velo. Les premiers etrangers que nous recontrons et qui voyagent comme nous … Allez, au point ou nous en sommes la montee au col peut bien attendre …

Les deux comperes n’en sont pas a leur premier periple a velo. D’abord entre les gouttes de pluie, puis autour d’un the pour nous rechauffer, nous partageons nos experiences a travers cette incroyable contree. Nos motivations se rejoignent: attester de nos propres yeux qu’il existe une Russie autre que celle qui est decrite par nos media. Par contre, nos facons de la parcourir et nos ojectifs different. Kim & Phil peuvent parcourir 170 km en une journee. Quand on leur demande leur itineraire, ils disent qu’il vont vers l’est, ne connaissent pas la geographie du pays, et en rougissent. Ils restent sur les gros axes, le nez dans le guidon, ne penetrent pas a l’interieur du pays. Ils font des rencontres eclairs sur le bord de la route et considerent comme une interview les questions que les gens leur posent. En plusieurs semaines dans le pays, ils n’ont jamais experimente le banya, l’incontournable sauna traditionnel russe, et n’ont jamais bu un verre de vodka avec un Russe.

Nos amis restent humbles de leur prouesse physique. C’est une belle rencontre;

nous tentons mutuellement de nous mettre a la place de l’autre. On accepte leur facon de voyager, chacun sa route, chacun son chemin; toutefois, on trouve dommage que, dans un pays aussi accueillant, ils n’aillent pas a la decouverte de la culture. Bonne route a vous les amis !!!

Nous realisons une bonne fois pour toutes, qu’avec la contrainte de temps liee a notre visa russe (il se termine fin aout), nous n’aurons pas le temps de parcourir a velo toute la distance que nous voulions. Nous esperons pouvoir obtenir une extension de quelques mois et aller jusque Vladivostok, mais quoiqu’il en soit nous devons combiner avec quelques trajets en train. Petite frustration malgre tout, mais notre maniere de voyager demande du temps. Le temps de contempler, de rencontrer, d’humer, de decouvrir, de jouir, de profiter, de prendre notre temps … Nous faisons beaucoup de rencontres et nous aimons honorer nos hotes jusqu’au bout, ce serait rompre l’echange que d’ecourter ce temps a passer ensemle. Pas question de passer a cote d’une rencontre sous pretexte des km a parcourir, nous en serions a rendre ces km comme l’objectif de notre aventure.

Voila, Nicolas Bouvier a raison “On croit qu’on va faire un voyage, mais bientot c’est le voyage qui vous fait, ou vous defait.” Nous ne lutterons pas, ce n’est pas necessaire, nous somme tres heureux de notre parcours, nous nous sentons en plein accord avec nos envies, nos desirs, nos visions. Ce voyage est inepuisable de richesses et de tresors.

Nous avons traverse l’Oural, la frontiere geographique naturelle entre les continents europeen et asiatique: nous sommes en Asie, aux portes de la Siberie … Nous continuons a nous emerveiller de ce pays. Plus nous progressons vers l’est, plus l’accueil est incroyable et tellement simple. Nous recevons des invitations surprises a tout moment de la journee, les gens poussent leurs murs pour caser dans leur ‘2 pieces’ tout notre equipement encombrant, y compris les velos (il n’y a souvent pas de cave), et font tout ce qui est en leur pouvoir pour nous mettre dans un cocon (parfois un peu trop mais ca fait partie du jeu).

Dans ces dernieres regions que nous avons traversees, nous avons constate un beau brassage culturel: les religions se diversifient, les nationalismes s’expriment, les visages s’arrondissent, les yeux se brident, les cheveux foncent. Une belle richesse culturelle … Les villageois sont ravis de notre curiosite quant a leur mode de vie. Le pays investit beaucoup dans les villes, les villages sont delaisses, meurent petit a petit, inexorablement, et nos hotes sont surpris et ravis que nous, les occidentaux, nous portions cet interet a leur vie chiche, modeste, simple, que nous soyons arrives chez eux par ces pistes cabossees qu’ils pensent impraticables pour nous. Ils nous le rendent bien … Beaucoup d’entre eux n’auront jamais la chance de pouvoir venir chez nous et ils nous considerent comme des fenetres sur l’Europe; nous sommes devenus des messagers … D’autant plus que notre Russe s’est bien ameliore, enfin ca doit ressembler a un truc carrement bizarre mais nous nous faisons comprendre et c’est bien la l’essentiel.

Notre vie de nomade nous procure une immense liberte. Quel plaisir intense de pouvoir nous arreter ou nous voulons, et d’y installer notre nid pour quelques heures. La nature russe se prete parfaitement a ce mode de vie: la propriete privee existe a peine, pas de risque d’envahir le territoire de quelqu’un, l’espace est immense, riche en petits coins sympas quand on parvient a eviter le train a grand vacarme (ici aussi ils ont le TGV), les grenouilles qui concertent toute la nuit et les hordes de moustiques sauvages ;c)) Une nature sauvage et tellement variee a travers laquelle nous ne ressentons pas de lassitude de transhumer a vitesse humaine.

Yves, tu nous avais dis que nous recevrions des cadeaux … Ils sont nombreux … Non contents de deja nous offrir une si genereuse hospitalite, nos hotes nous gatent un peu plus avec de l’artisanat local, un talisman du Coran, 2 kg de pommes de terre (c’est lourd hein DoM ?), un pot de miel bashkir et parfois meme quelques roubles pour nous aider a aller plus loin. On nous offre l’hospitalite, le the mais aussi tout simplement de l’aide a trouver le puits pour y prendre notre reserve d’eau, en nous escortant a travers la ville ou en reparant un odometre casse. C’est de cette generosite humaine que nos coeurs se gonflent chaque jour.

Arsene est musicien. Nous sommes en train de pique-niquer dans un petit village quand il s’approche de nous et nous propose de jouer de l’accordeon et de chanter pour nous. Quelques mamans attirees par le son festif nous rejoignent et se mettent a danser. Un inoubliable moment de joie …

Nous sommes dans une cantine, il fait trop froid pour pique-niquer, et c’est Alexandre qui vient nous tenir compagnie. Sauf qu’il est tellement saoul que nous ne parvenons pas a comprendre ce qu’il nous raconte. Mais il s’accroche et parle et parle; certainement un grand philosophe … Nous avons maitrise l’art de nous montrer interesses a son discours, que faire d’autre …

A Yermounchino, un village bashkir au-dela duquel la route s’arrete, Rim est invalide mais s’occupe meticuleusement de ses ruches. En nous faisant gouter son miel succulent qui degouline encore des alveoles, il nous confie qu’il ne regrette en rien l’epoque sovietique (meme si le systeme actuel n’est pas la panacee) ou il avait peut-etre une meilleure securite d’emploi, ou la vie etait moins chere, ou il avait de l’argent mais rien a acheter et surtout aucune liberte. En general, dans les villages, les gens regrettent cette epoque; nous apprecions sa lucidite.

Il y a eu aussi Teddy, ou Bouba, ou Winnie, un ours quoi. Nous descendions a pieds (on a lache les velos durant 3 jours, quelques vacances au bord d’un superbe lac) d’un petit sommet et il est apparu furtivement. Une boule de poils bruns, une grosse masse pataude mais qui se deplace avec leste a travers la foret. On a reussi a le suivre encore un peu des yeux mais c’etait trop court. Quel moment de bonheur et d’emotions.

Il pleut. A Cim, nous cherchons un cafe pour dejeuner au sec. Un homme nous accoste et nous invite chez lui, comme ca spontanement. Aviel a a peine 30 ans, est Pope et vit dans une isba qu’il retape depuis 3 ans pour y accueillir son eglise. Il vient d’une petite ville du Tatarstan, a un jour ouvert la carte et au pif a pointe cet endroit, celui ou il allait fonder son eglise. Une rencontre un peu insolite, dans ce monde un peu austere de l’eglise orthodoxe russe. Il nous emmene en balade et nous nous retrouvons bien autour de notre amour de la nature. Le soir c’est banya et DoM aura l’immense honneur d’etre masse par des mains religieuses …

A Chelyabinsk, ou nous sommes arrives mardi soir, c’est chez Piotr que nous squattons. Il a appris 10 minutes avant notre arrivee, par l’intermediaire de son ami Roman (que nous avons rencontre sur Internet), qu’il allait accueillir 2 Francais qui voyagent a velo. Tout est en place sauf qu’il n’a pas d’eau chaude en ce moment car la ville repare les canalisations. Qu’a cela ne tienne, il se demenera toute la soiree pour que nous puissions prendre une douche chaude, au detriment de manger a temps et de faire souffrir nos estomacs creuses par les 83 km de la journee. A l’heure du repas, il nous ouvre son frigo rempli de pommes, d’oranges et de pamplemousses, les ingredients de son regime alimetaire !!!

A vous tous que nous avons rencontres sur notre route, nous ne pourrons jamais assez vous dedier notre reconnaissance.

Demain soir nous prendrons le train en direction de Krasnoyarsk, a plus de 2000 km d’ici, 2000 km de steppe monotone, infestee de moustiques, ca ira nous ne regretterons pas trop … 35 heures de voyage, on aura experimente une bribe du Transsiberien … On stresse un peu car nous ne sommes autorises qu’a 50 kg chacun et un volume dont l’addition des 3 mesures ne depasse pas 180 cm; nous avons en tout 167 kg et un volume qui explose les contraintes imposees. Faudra simuler notre naivete de touristes qui ne comprennent pas grand chose au systeme et faire un grand sourire un peu benet a la mama responsable de notre wagon pour faire passer la pilule. Ca promet … Et apres ca sera le lac Baikal en ligne de mire …

Bel ete a vous tous.